La séparation forcée entre la vache et son nouveau né

La séparation forcée entre la vache et son nouveau né

La pratique remise en cause

Dans un élevage laitier, peu importe la taille de l’élevage, bio ou pas bio, une vache, comme tout mammifère, produit du lait pour son bébé. L’humain veut ce lait pour sa consommation de produits laitiers, et le veau, lui, en a besoin pour sa survie.

Le choix est facile du point de vue de l’éleveur. L’un lui coûte de l’argent, l’autre lui en rapporte. Sans hésitation, le nouveau-né est séparé de sa maman dans les 24 heures qui suivent sa naissance, et le lait qui lui était naturellement destiné est maintenant devenu un produit que l’on met dans un bol de céréales, pour adoucir un café, rendre un gâteau moelleux, ou le transformer en fromage.

Cette pratique est un standard, pas une exception. Pour chaque produit laitier créé, une maman a dû être séparée de son bébé.

Si vous vous demandez pourquoi la vache dans la vidéo court après son petit, lisez la suite.

L’impact sur ces êtres sensibles

Pour comprendre l’impact qu’une telle pratique a sur les vaches et leurs veaux, il faut tout d’abord comprendre comment ces animaux non humains, riches en émotions, ressentent. Sans ça, on peut facilement arriver à des conclusions selon lesquelles cette séparation n’a aucun impact sur eux, et, comme certains éleveurs peuvent souvent le faire croire, elle est vendue comme un acte de bienveillance.

Le lien maternel

C’est dans les gènes

L’instinct maternel chez les mammifères est, d’un point de vue évolutif, la chose la plus importante pour assurer la survie d’un nouveau-né dans ces espèces. Si les mamans n’avaient pas cette envie naturelle de nourrir leur bébé, l’espèce disparaîtrait. Le lien maternel est cette envie incontrôlable entre le bébé et sa maman d’être proches l’un de l’autre ; sans ce lien, l’enfant ne voudrait jamais être avec sa maman et périrait, et la maman rejetterait son nouveau-né, et celui-ci périrait.

Naissance d’un lien sacré

À peine le veau venu au monde, sa mère se met à le lécher avec une intensité particulière durant la première heure. Attirée par les fluides de naissance, elle concentre toute son attention sur son petit, guidée par un puissant instinct maternel. Dans cette intimité, elle émet de faibles vocalises, la bouche fermée, comme un langage tendre et discret, réservé à ce moment unique. C’est au cours de ces premières heures que le nouveau-né apprend à reconnaître la voix de sa mère, une empreinte qui leur permettra de s’appeler et de se retrouver tout au long de leur vie.

Chaque vache et chaque veau possèdent une voix qui leur est propre, comme une signature intime. Ces appels de contact, uniques à chaque duo, leur permettent de rester liés même à distance. Cette reconnaissance est réciproque : une mère répond avant tout à l’appel de son petit, et le veau reconnaît, parmi toutes les voix, celle de sa mère.

Le bébé tètera sa mère pendant des mois et passera tout doucement vers le sevrage.

Un lien à vie

L’on pourrait croire que ce lien disparaîtra petit à petit. Il est vrai qu’à un moment donné, la vache va commencer à pousser son veau à prioriser le broutage d’herbe plutôt que l’allaitement, qui se produit 7 à 12 mois après la naissance. Mais ce n’est pas un signe de rejet, c’est tout simplement une transition comme elle se fait chez les humains. À un moment donné, l’allaitement évolue vers d’autres options, mais ce n’est pas le signe d’un rejet de la mère envers son enfant, c’est simplement un nouveau chapitre dans la vie de son enfant.

L’attachement entre une mère et son petit ne disparaît pas au sevrage. Dans un troupeau semi-sauvage suivi pendant plusieurs années, les vaches continuaient à préférer la compagnie de leurs enfants — qu’il s’agisse de leurs fils ou de leurs filles — bien après qu’ils aient atteint leur maturité sexuelle. Elles choisissaient de paître à leurs côtés, de les toiletter et de partager leur quotidien de préférence à celui d’individus non apparentés. Ainsi, lorsque mère et enfant demeurent dans le même troupeau, ce lien originel perdure et fait d’eux des compagnons privilégiés tout au long de leur vie.

Le problème du veau

Dans une ferme laitière, la naissance d’un veau pose un problème immédiat. Le lait que sa mère produit naturellement pour le nourrir n’entre pas dans la logique économique de l’exploitation : il doit être destiné à la consommation humaine.

Si l’on veut ce lait dans nos céréales, dans notre café ou transformé en yaourt ou fromage, le veau ne peut pas rester auprès de sa mère. Il boirait chaque jour des dizaines de litres — parfois plus de la moitié de la production — réduisant d’autant la part que l’éleveur peut vendre.

La séparation

La solution contre ce déficit est d’intervenir entre la maman et son nouveau-né. En moins de 24 heures, l’éleveur va forcer la séparation entre le nouveau-né et sa maman, et si vous avez lu et compris la force du lien maternel qui se met en place en seulement quelques heures, cette séparation est extrêmement douloureuse. Si vous habitez près d’une ferme laitière et entendez les vaches crier, ce sont les cris d’une mère à qui a été arrachée la chose la plus précieuse au monde pour elle : son bébé.

Cette séparation va impacter ce duo pendant des semaines : un veau désespéré d’être aux côtés de sa mère, et une mère qui agonise après avoir perdu son enfant.

Un lien brisé

Une vache va connaître cette séparation chaque année ; pour maintenir sa production de lait, elle sera artificiellement inséminée pour que sa production ne cesse jamais, et tous les ans, nous allons lui retirer son bébé, et chaque année, elle agonisera, ne comprenant pas pourquoi elle n’a jamais eu la chance de passer plus de 24 heures avec son nouveau-né et de créer une vie avec eux.

Mais le plus sombre n’est pas encore là. Les études montrent qu’après 2 ou 3 cycles de séparations, cet instinct maternel commence à disparaître, et peut même devenir un instinct de défense. Après des années de traumatisme, la naissance n’est plus un moment qu’elle savoure ; son instinct lui a été arraché — elle comprend maintenant que son bébé ne lui appartient plus, abandonne son rôle de maman et, des fois, peut même se montrer violente envers son propre bébé.

Si vous entendez des éleveurs qui se disent bienveillants quand ils séparent le veau de la vache, car une vache peut blesser son bébé, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg.

Que fait-on des bébés ?

Les femelles suivront le parcours de leur maman. Elles deviendront des vaches laitières et vivront le même cycle de séparations, et ne sauront jamais ce que c’est que d’être maman. Les mâles, eux, sont vus comme des déchets. Ils ne servent à rien. Leur engraissement pour de la chair de bœuf prendrait trop de temps et de ressources, car leur race n’est pas la même que celle de ceux qui sont nés dans les élevages bovins. Alors, plus tôt on les exécute, moins cher ils coûtent. La chair de veau est la chair d’un enfant de quelques semaines seulement, qui a été arraché à sa mère et qui n’avait pas de valeur pour le fermier afin de le garder en vie.

Aidez des individus liés à cet article

  • Pinpin
    Domaine des Douages

    Pinpin

    Domaine des Douages

    Particulièrement doux et affectueux, Pinpin est comme un chien qui viendrait chercher des caresses. Il a toujours eu cette facilité à aller vers les humains. Sa confiance et son envie de contact sont d'ailleurs ce qui lui ont permis d’échapper à l’abattoir. Aujourd’hui encore, il garde cette même tendresse et cette curiosité qui le rendent si attachant.

  • Pumba
    Domaine des Douages

    Pumba

    Domaine des Douages

    Pumba est un taureau réservé mais très doux et respectueux. Il passe ses journées à explorer les grands espaces du sanctuaire en compagnie de son petit troupeau.

  • Médusa
    Domaine des Douages

    Médusa

    Domaine des Douages

    Timide avec un grand cœur, Médusa a malheureusement eu un passé difficile, ce qui rend le contact humain pas aussi naturel que pour d'autres. Elle passe ses journées à gambader dans les champs du sanctuaire avec son troupeau intime.